Le 25 février 2014, la société Vale NC a été reconnue coupable par la Cour d’Appel de Nouméa pour la pollution industrielle du Creek de la Baie Nord par déversement acide survenu le 1° avril 2009. Elle a aussi été condamnée à payer 40 millions CFP pour la réparation des dommages causés aux 5 associations de défense de la nature qui avaient engagé le recours contre l’industriel : Action Biosphère, Codef Sud, Corail Vivant, EPLP et Point Zéro. Cet arrêt est une première qui fera jurisprudence, moins pour la somme obtenue, qui reste modeste au regard des dégâts infligés à l’environnement, que pour sa valeur symbolique : la Justice a reconnu que les associations ont eu raison d’agir pour défendre le patrimoine naturel calédonien et elles sont fondées à réclamer réparation. Pour dissiper toute ambiguïté, les associations ne pourront affecter les sommes obtenues qu’à des actions en rapport avec leur objet dans le cadre des statuts qui les régissent.
Un acte de résistance contre la destruction programmée de la biodiversité du Sud
Dès la construction de l’usine pilote d’INCO dans les années 1998, Action Biosphère avait tiré la sonnette d’alarme sur les conséquences potentielles de l’usine du Sud : le décapage de centaines d’hectares de végétation, avec l’érosion qui en découle, la mise en péril d’écosystèmes sensibles, des risques importants de contamination chimique des creeks et des nappes phréatiques, la pollution du lagon et des baies par rejet en mer de millions de m3 de boues toxiques. En 2007 plusieurs associations ont constitué Codef Sud pour unir leur force. Elles ont décidé d’agir en partenariat avec Rheebu Nuu, qui regroupait les populations du Sud, résolues à se battre contre les menaces sur leur milieu et leurs ressources vivrières. En 2009, la fuite d’acide dans le Creek de la Baie Nord a provoqué la mort de centaines d’organismes vivants, dont des poissons endémiques très localisés. Depuis, les « incidents » dans et autour de l’usine se sont multipliés : le dépérissement de 55 hectares de chênes gommes, l’envasement des baies (Port Boisé et Kwé), l’effondrement d’une colonne d’extraction, la rupture inopinée du tuyau de rejets en mer…Mais le pire est peut-être encore à venir, nul ne sait ce que nous réserve l’usine du Sud. Le recours des associations n’est en définitive qu’un acte non violent de résistance et de légitime défense contre une suite inacceptable de négligences, de dégradations de l’environnement ou d’agressions, qui ont très souvent bénéficié de la part des autorités d’une incompréhensible complicité.
Politique minière ou stratégie de la terre brûlée ?
Serons-nous capables de tirer les leçons de l’usine du Sud ? L’accord de prospection récent donné par la Province Sud à Valé NC et la SLN, dans le secteur de Prony et Pernod, à des conditions très avantageuses pour les sociétés minières, peut en faire douter. Cet accord « à la sauvette » relève en effet de la même logique que celle qui a prévalu quand on a bradé, en catimini, le gisement de Goro à INCO, avec les conflits violents et la destruction programmée de l’environnement qui s’en sont suivis. Le classement Ramsar d’un large périmètre autour de Prony et Pernod ne doit pas faire illusion. Une région protégée sur le papier n’autorise pas à saccager tout le reste. Nous voulons espérer que la politique minière de la Province Sud va dans le sens de l’intérêt général et ne relève pas d’une stratégie de la terre brûlée. « C’est quand on regarde les montagnes sans y toucher qu’elles prennent de la valeur ».
le 22 avril 2014, ACTION BIOSPHERE
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