Lettre ouverte à propos de la réglementation de la pêche en Province Sud et en Province Nord
Nouméa, le 2 juin 2008
à
Madame Isabelle Ohlen Adjointe au président de la Province Sud chargée de l’Environnement et Monsieur Christophe Obled, Directeur du Service de l’Environnement de la Province Sud,
Madame, Monsieur,
Loin des déclarations médiatiques sur l’inscription du lagon au patrimoine de l’Humanité, soucieux de préserver au quotidien les ressources de la mer, comme ces pêcheurs de Port Bouquet qui ont récemment demandé la création d’une réserve marine dans leur région, nous tenons à vous faire part de nos inquiétudes sur l’état actuel de la réglementation de la pêche en Nouvelle-Calédonie et de son application.
Même si les mentalités évoluent, nous ne sommes pas à l’abri de massacres comme celui auquel se sont livrés quelques plaisanciers peu scrupuleux en septembre 2007, qui avait défrayé la chronique. Le Syndicat des pêcheurs lagonaires était intervenu à l’époque pour que des mesures soient prises, aussi bien à l’encontre des auteurs de ce pillage délictueux, que sur la réglementation pour éviter de tels excès. Suite aux déclarations de Madame Ohlen, annonçant que les auteurs seront poursuivis, nous souhaiterions connaître les suites qui ont été données à cette affaire et quelles ont été les sanctions.
Sur le plan de la réglementation, nous avons constaté quelques avancées, comme l’interdiction en Province Nord et en Province Sud de la pêche à la tortue, et récemment celle du napoléon en Province Sud.
Par contre concernant les langoustes, la réglementation en Province Sud n’a pas évoluée et ne nous paraît plus appropriée.
La délibération n° 04-2004 APS du 31-03-2004, parue au JO du 13-04-2004 stipule bien que la pêche sous-marine est interdite entre le coucher et le lever du soleil, mais que les pêcheurs professionnels ne sont pas soumis à cette interdiction et peuvent donc se livrer sans restriction à la pêche aux langoustes en plongée de nuit au projecteur.
Nous considérons que cette dérogation ouvre la porte à des excès susceptibles de mettre en péril les stocks. Or les quatre espèces de langoustes qu’on trouve en Nouvelle-Calédonie se nourrissent surtout la nuit, ce qui les rend très vulnérables et facile à attraper.
Rappelons que la pêche de nuit en plongée est à ce jour totalement interdite en Province Nord et qu’elle est très encadrée en Tasmanie, où même les plaisanciers doivent avoir une licence, la taille minimum au céphalothorax est de 11 cm pour les mâles et de 10,5 cm pour les femelles contre 7,5 cm en Nouvelle-Calédonie, où la pêche est interdite en septembre et octobre pour les mâles et de mai à octobre pour les femelles, la capture de femelles grainées étant prohibée en tout temps et que la vente par des plaisancier est interdite.
Nous proposons donc, en Province Nord et en Province Sud, les mesures suivantes :
- Le classement de la pêche aux langoustes et cigales de mer en pêche spéciale soumise à licence spécifique pour les professionnels
- L’interdiction totale de la plongée de nuit assortie d’une dérogation pour les pêcheurs professionnels munis de cette licence de pratiquer la pêche de nuit du 1° au 31 décembre, dans la limite d’un quota à déterminer et le respect de la taille réglementaire.
En ce qui concerne le napoléon, une délibération récente en a interdit la pêche en Province Sud. Celle-ci reste toutefois autorisée en Province Nord pour des individus d’une taille supérieure à x cm. S’il est commercialisé à Nouméa, comment garantir qu’il a bien été pêché en Province Nord ? De telles incohérences nuisent gravement à l’efficacité des réglementations, ce qui nous conduit à demander que les réglementations soient harmoniées pour l’ensemble du Pays.
Participant activement au comité de suivi de la pêche en province Nord, qui regroupe des professionnels, des techniciens, des coutumiers des représentants d’associations, nous considérons cette structure d’une grande utilité pour faire avancer la réglementation. A quand la mise en place d’un comité semblable en Province Sud ?
Pour nous, l’inscription du lagon au patrimoine de l’humanité n’a de sens que dans la mesure où elle contribue à renforcer la protection de nos ressources marines. Celle-ci passe nécessairement par une large implication des populations, l’adoption d’une réglementation appropriée après consultation des partenaires et représentants de la société civile et enfin les moyens nécessaires pour la faire appliquer.
- Se connecter pour publier des commentaires