Table Ronde avec Nicolas Hulot du 17 novembre 2014 - Contribution d’Action Biosphère
Dans le cadre d’une table ronde organisée par le gouvernement le 17 novembre 2014, les associations environnementales de Nouvelle Calédonie sont invitées à rencontrer Nicolas HULOT pour faire le point sur les principaux problèmes environnementaux en Nouvelle-Calédonie. Voici les dossiers qu’Action Biosphère estime devoir être traités prioritairement :
Une politique cohérente de lutte contre le réchauffement climatique
- Où en sommes-nous ?
En 2015, avec 3 centrales thermiques au charbon, 3 usines métallurgiques, la Nouvelle-Calédonie rejettera 8,8 millions de tonnes de CO2/an, soit 36,8 t/hab/an et se situera dans le peloton de tête des pays émetteurs de gaz à effet de serre. A titre de comparaison, la France se situe à 8,5 t/hab/an.(Source : Rapport des 9 ateliers diagnostic – NC 2025)
- Une situation paradoxale
Pour des raisons obscures, le Protocole de Kyoto n’est pas applicable en Nouvelle Calédonie. Le développement effréné de l’industrie du nickel se traduit par une augmentation sans précédent de ses émissions de CO2. Mais par solidarité avec les populations des états insulaires du Pacifique, menacées par la montée des eaux, elle se doit de prendre des mesures concrètes et ne pas se contenter d’opérations de communication en agissant sur ses sources d’émission de CO2.
- Quelles mesures prendre ?
Dans le cadre d’un plan de maîtrise des émissions de gaz à effet de serre, à titre d’exemples, en voici quelques- unes :
- Refus des mesures de défiscalisation aux centrales à charbon
- Taxer à l’importation le charbon et le fuel pour créer un fonds de soutien au développement des énergies renouvelables et aux transports en commun
- Soutenir la recherche en matière d’énergie solaire thermique, de géothermie profonde, de culture d’algues
- Par des mesures incitatives, (ex : tarif de rachat du kwh solaire ou éolien, crédit d’impôt…), encourager les citoyens et les bailleurs sociaux à équiper les logements en unités de production d’énergie renouvelable (solaire, éolien, biomasse…)
- Développer des moyens de transport en commun propres, rapides, confortables et sûrs
Mines et métallurgie: pour l’élaboration et la mise en œuvre d’une politique minière cohérente
- Réaliser une étude globale de l’activité nickel en Nouvelle Calédonie depuis son origine, à l’échelle des communes et du Pays, incluant les impacts économiques, environnementaux, sociaux, culturels et sanitaires ( Ex : amiante)
- Créer un fonds nickel pour les générations futures
- Réparer les dégâts occasionnés par la mine avec la réhabilitation de 20 000 hectares de mines orphelines pour un coût de : 8 millions x 20 000 = 160 milliards Cfp
- Adopter une politique minière à long terme, cohérente, transparente, équitable au profit du Pays
- Empêcher les multinationales de s’approprier les ressources minières au détriment des populations
- Faire prendre en charge par les opérateurs miniers et métallurgiques les externalités liées à l’industrie du nickel ( Ex : le coût des rejets de CO2 qui seraient actuellement de 29 milliards et qui pourraient s’élever en 2050 à 92 milliards cfp)
- Taxer l’exportation de minerai brut
- Adopter un cadre juridique rigoureux pour réglementer les activités extractives sous-marines et prévenir leurs conséquences sur le milieu
- Retirer les avantages fiscaux en cas de non -respect avéré des mesures de protection de l’environnement
Ressources naturelles
- Un patrimoine naturel exceptionnel
Avec 80% d’espèces endémiques de flore, la NC est un hot spot de la biodiversité mondiale. Même si la protection de l’environnement est une compétence transférée aux provinces, la France garde la responsabilité de l’application localement des engagements qu’elle a contracté dans le cadre des conventions internationales ( Rio, Nagoya…)
- Quelles mesures prendre ?
- Comme à Santo (Vanuatu), réaliser en Nouvelle Calédonie, sous l’égide du Muséum d’Histoire Naturelle, un inventaire de la biodiversité ayant pour objet d’identifier et de localiser les espèces et les espaces remarquables à protéger
- Cette étude aurait vocation à être une référence pour tout projet d’aménagement du Territoire
- Veiller au suivi des plans de conservation des espèces menacées
- Renforcer les moyens de lutte contre les espèces envahissantes
- Accompagner les collectivités locales dans l’organisation et les moyens de lutte contre les feux de brousse qui ne sont pas à ce jour, à la hauteur des enjeux
- Contrôler le commerce des espèces endémiques et protéger le patrimoine génétique contre le bio- piratage.
Une agriculture saine pour une population en bonne santé
L’agriculture représente une part infime de l’économie calédonienne. Son rôle est pourtant essentiel pour répondre aux besoins des populations : garantir la sécurité alimentaire quantitativement et qualitativement. C’est donc un secteur économique à développer en valorisant la production locale répondant à des critères de qualité et en adoptant les mesures suivantes :
- Développer les circuits courts
- Mettre un terme à l’importation et la mise sur le marché de pesticides non autorisés en Europe
- Encourager et former les producteurs pour passer d’une agriculture conventionnelle à une agriculture biologique
- Créer un conservatoire des semences
- Créer des unités de transformation des fruits et des légumes pour assurer un débouché aux productions locales
- Imposer dans les cantines, l’utilisation au moins partielle de produits issus de l’agriculture biologique
- Interdire l’importation et la culture OGM, notamment l’importation de blé OGM australien
- Réglementer l’étiquetage des produits.
- Protéger le marché local face à l’importation de nourriture industrielle de piètre qualité à moindre coût comme le poulet brésilien
La participation du public
La Nouvelle-Calédonie est un Pays en construction. On notera que la Convention d’Aarhus n’est pas applicable en Nouvelle-Calédonie. Il est donc essentiel, dans un souci de bonne gouvernance et de prévention de la corruption, de garantir juridiquement à la société civile le droit à l’information et la possibilité de faire valoir son avis sur tout projet touchant à la vie quotidienne et de s’impliquer dans l’élaboration et la gestion de projets d’intérêt public.
Nous demandons donc le strict respect des principes de la Charte de l’environnement adossée à la Constitution :
- Particulièrement l’application des principes de prévention et de précaution, qui implique la réalisation d’une étude d’impact.
- L’information et la consultation du public dans le cadre d’enquête publiques ou toute autre procédure permettant aux citoyens d’émettre un avis, qu’il appartient aux autorités compétentes de prendre en compte au moment de la prise de décision.
- Les accords de « libre échange », tels que le MSGTA doivent faire l’objet d’une consultation du public
- Des mesures de contrôle par les citoyens, doivent être prises, pour empêcher les multinationales de dicter leurs conditions dans de nombreux domaines (adduction d’eau, gestion des déchets, mines, distribution, santé, information) au détriment des hommes et de l’environnement
ACTION BIOSPHERE, le 18 novembre 2014
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