Les pollueurs seront-ils les payeurs ?
Aujourd’hui encore, la réglementation minière en Nouvelle-Calédonie, qui date de 1954, ne fait pas obligation au mineur de réhabiliter le site après exploitation. Les mines abandonnées représentent en Nouvelle-Calédonie 20.000 hectares et le coût de leur réhabilitation se chiffre à 160 milliards CFP (estimation du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie). Quelle garantie bancaire la société Goro Nickel a-t-elle été tenue d’apporter, pour assurer la réhabilitation du site après exploitation ?
Quel avenir pour la biodiversité du Sud, en particulier celle de la Plaine des Lacs ?
Le Sud recèle une biodiversité exceptionnelle. A-t-on fait l’inventaire de la totalité des espèces de faune et de flore endémiques présentes dans la zone, qui dépasse très largement les limites de l’exploitation, et quels plans a-t-on mis en place pour garantir la conservation des espèces menacées ? Avons-nous la preuve formelle que la mine, du fait de sa profondeur ( 70 mètres) ne modifiera pas gravement les réseaux karstiques et plus précisément , cette excavation ne risque-t-elle pas, à terme, d’assécher la Plaine des Lacs ?
A-t-on vraiment évalué les risques du procédé de lixiviation acide sur l’environnement et la santé à long terme ?
La lixiviation acide est un procédé chimique, qui lessive le minerai sous pression à haute température et qui libérera aussi quantité de métaux lourds, et de substances diverses, comme le chrome, le manganèse, le magnésium, le cadmium, le mercure, l’arsenic…considérés comme des déchets, qui seront stockés à terre ou rejetés dans le lagon, mélangé à du calcaire, et des solvants. A-t-on une connaissance précise sur la recombinaison de ces éléments entre eux et sur les effets qu’ils peuvent avoir sur les organismes vivants et leur bioaccumulation à long terme ? A-t-on évalué les conséquences de la porosité ou de la rupture du géotextile du bassin de résidus ou un débordement de ce même bassin ?
Les rejets en mer ne risquent-ils pas d’impacter la Réserve Merlet et l’ensemble des écosystèmes marins de la région ?
Le projet tel qu’il est présenté actuellement prévoit le rejet de 36 000 mètres cube / jour d’eau douce, de surnageants et de résidus divers mal connue à une température de 40°. Chacun sait que l’eau douce tue les coraux et la moindre élévation de la température peut leur être fatale. L’exutoire sera placé à 38 mètres de fond où les courants sont faibles, contrairement à ce qu’affirme l’industriel, ce qui risque de former une gigantesque lentille comme celle retenue sous les Loyauté, qui se déplacera au premier coup de vent ou courant venu. Sommes-nous prêts à sacrifier la Réserve Merlet, la Baie de Prony, les récifs de coraux, l’ensemble des écosystèmes marins et les ressources marines de la région ?
A-t-on mesuré les risques inhérents à l’intensification du trafic maritime, en particulier les risques de marée noire en Baie de Prony et quelles sont les mesures de prévention ?
Le port, par où transitera l’intégralité des marchandises destinées à alimenter le complexe industriel se situe en Baie de Prony, où les scientifiques ont découvert des concrétions et formations coralliennes remarquables en raison des sources d’eau chaudes souterraines. Le trafic maritime y est évalué à 4 mouvements de bateaux par semaine, ce qui implique un risque élevé d’accidents et éventuellement de marée noire. D’autant que ces bateaux vont croiser ceux du rail Nouméa – Havannah : caboteurs, paquebots, minéraliers etc… Quelles seraient les conséquences d’une telle catastrophe sur l’ensemble du littoral du Sud, sur la faune marine et plus particulièrement sur la Baie de Prony ?
Quels seront les recours en cas d’atteinte à la santé des travailleurs et des populations riveraines ?
Malgré les mises en garde comme celles de l’association ADEVA- NC, l’industriel et les autorités minimisent les risques de la mine (amiante) et de l’usine (sous sulfure de nickel) sur la santé. Pour l’amiante, ils s’appuient en effet sur des analyses faites résultant d’un protocole inapproprié. Compte tenu du fait que le risque amiante n’est pas officiellement reconnu, et en l’absence d’étude épidémiologique, quel recours auront les travailleurs et les populations riveraines, quand ils constateront dans 20 ou 30 ans qu’ils sont atteints de cancers de la plèvre ou d’autres pathologies liées à l’exploitation de la mine ou au fonctionnement de l’usine ? Pourquoi n’utilise-t-on pas le protocole d’analyse en usage en Corse pour mesurer l’amiante ?
Le projet de l’usine du Sud a-t-il fait l’objet d’un accord avec les populations calédoniennes et plus particulièrement autochtone ?
La Nouvelle-Calédonie est inscrite depuis 1986 sur la liste des Territoires à décoloniser de l’ONU. Pour tout projet industriel de ce type, le consentement préalable et éclairé, recommandé par le conseil international des mines et métaux dont CVRD est membre, et par l’ONU, exige que les chefferies, clans, et toutes populations concernées doivent donner leur accord avant tous travaux. Dans ces conditions, la vente par la France du gisement du BRGM à INCO, en 1992, pour une somme de 3 milliards CFP, qui peut être considéré comme une transaction à « vil prix », ne constitue-t-elle pas une spoliation, en violation des lois internationales ?
Pourquoi le Projet Goro Nickel a-t-il continué à bénéficier de la défiscalisation malgré l’annulation par le Tribunal Administratif de l’autorisation ICPE ?
Malgré l’annulation par le Tribunal Administratif de l’autorisation ICPE en juin 2006, essentiellement pour non respect des normes environnementales :
- l’Etat français a maintenu son aide à travers la défiscalisation, pour un montant de 626 millions de $, qui était pourtant soumise au strict respect des normes environnementales.
- l’exonération de tout impôt pendant 15 ans
- la suppression des taxes à l’importation de tout matériel minier depuis la mise en route du projet.
Compte tenu du risque industriel, Goro Nickel relève de la réglementation Sévéso 2. Pourquoi les procédures inhérentes à ce classement ne sont-elles pas respectées ?
Le Sud calédonien se situe à proximité de la zone de subduction des plaques tectoniques et se trouve de ce fait exposé aux risques sismiques. Ce risque s’ajoute à celui du procédé d’acide sous pression. Sachant que la zone létale, en cas d’accident grave est évaluée à 5km autour de l’usine, ces risques, ont-ils été évalués à leur juste mesure ? Existe-t-il un POI (Plan d’Opération Interne, et un PPI (Plan Particulier d’Intervention ) et les populations sont-elles informées préventivement de ces risques ? Dans un autre domaine, depuis 1998, un site ICPE doit obtenir une certification Assurance Qualité ISO 9001. Goro Nickel a-t-elle cette certification ? Pourquoi l’industriel refuse-t-il d’appliquer la norme qualité ISO 14001 ?
L’usine du Sud correspond-elle à la volonté de rééquilibrage inscrit dans les Accords Matignon / Nouméa ?
Alors que le Schéma directeur des Mines n’a pas encore été adopté, qu’il n’y a aucune garantie concernant la réalisation de l’usine du Nord, l’usine du Sud, elle, se poursuit, contre l’avis des populations kanak du sud, de Rhéébu Nuu et du Caugern, de citoyens soucieux de leur avenir et de celui de leurs enfants, sans autorisation ICPE, « aux risques et périls de l’industriel »… avec le consentement tacite quasi unanime de la classe politique. Comment peut-on concilier ce projet qui ne peut qu’accentuer le déséquilibre social et économique du Pays, avec le respect des Accords de Matignon et Nouméa ?
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