Observations dans le cadre de l’enquête publique ICPE
1. Sur la forme
Le document est très fourni sur l’état initial du milieu humain et naturel, mais sa très mauvaise présentation le rend difficilement exploitable. Les prévisions de pollution sont difficilement accessibles. Une version mieux référencée, présentant les annexes de façon plus claire doit être fournie au public. Les dossiers doivent porter des noms explicites. Un tableau global présentant les différentes sources de pollution et leur nature, débit…serait le bienvenu.
2. Sur le fond
- L’approvisionnement en eau douce des installations minières du projet Koniambo ne doit pas mettre en péril les ressources en eau potable des populations ni l’équilibre écologique de la faune et la flore de la région.
- Les espèces endémiques rares ou vulnérables de faune et de flore dans le périmètre du complexe industriel doivent être protégées et la conservation des espèces doit être garantie in situ. Sur mine, un inventaire préalable de faune et de flore doit être effectué, les zones servant d’habitat aux espèces en danger doivent être identifiées, ainsi que les zones tampons et les corridors écologiques, préalablement à toute exploitation. Le pétrel de Tahiti niche en Nouvelle-Calédonie. Il est important de préserver les zones de densité maximales de nidification pour minimiser l’impact de la mine sur les populations. Cela signifie que les surfaces d’extraction du minerai doivent être choisies en dehors de ces zones. Si l’habitat d’espèces comme le Pétrel de Tahiti ou la Mégalure calédonienne ne peut être préservé sur le site de Koniambo, un site approprié doit être trouvé permettant à ces espèces de s’y adapter et de s’y reproduire. La pérennité de ces espèces doit être garantie préalablement à toute exploitation. Les parcelles de forêt sclérophylle sur la presqu’ile de Vavouto doivent faire l’objet de mesures de protection.
- Le choix de Vavouto pour l’accès de bateaux à fort tirant d’eau, nécessitant un chenal d’accès et près de 9 millions de m3 de débris de dragage et leur rejet en mer ne nous paraît pas acceptable au regard des risques pour l’environnement marin, en particulier les coraux et les espèces inféodées. Le port et éventuellement l’usine devraient être installés en bord de mer sur un site en eau profonde, ne nécessitant pas la destruction massive du milieu marin et le minerai pourrait être acheminé par barges.
- Le milieu marin risque également d’être fortement perturbé par l’enfouissement au fond de la mer d’un tuyau de rejet de l’eau de refroidissement de l’usine. La pose de cet émissaire nécessite une fouille générant des déchets de dragage et la mise en suspension de fines extrêmement préjudiciable aux coraux. Une autre solution, qui ne porte pas atteinte au milieu marin doit être envisagée.
- Le stockage des scories doit se faire dans le respect de l’environnement et ne pas détruire ou perturber un milieu riche ou fragile. La composition chimique de ces scories doit être précisément identifiée. Si celles-ci présentent un quelconque danger, par exemple par la présence de chrome 6, ou d’autres substances dangereuses, elles ne peuvent être considérées comme déchets inertes et doivent donc faire l’objet d’une gestion particulière.
- Les rejets atmosphériques de l’usine et de la centrale électrique ne doivent pas dépasser les limites imposées par le Protocole de Kyoto à une entreprise équivalente en métropole. Ils doivent être plus clairement explicités et le rejet de Nox issu de la calcination du minerai doit être mieux défini. Les prévisions semblent importantes.
- Toute surface décapée doit faire l’objet d’un reboisement en espèces endémiques.
- L’érosion liée à la destruction du couvert végétal doit être soigneusement contrôlée par des ouvrages appropriés pour éviter que les eaux de ruissellement ne polluent les creeks et les cours d’eau de surface ou les nappes phréatiques. Ces ouvrages doivent être prévus et dimensionnés en prenant en compte les périodes de cyclones et de fortes pluies. Les eaux chargées en sédiments doivent être canalisées et traitées avant tout rejet dans la nature.
- Le projet va générer un afflux massif de population ; les communes riveraines sont-elles prêtes à accueillir ces arrivants en termes d’infrastructures : écoles, alimentation en eau potable en quantité et qualité suffisante, soins, gestion des eaux usées et des déchets ?
- A-t-on préparé les populations riveraines des tribus au choc culturel induit par l’irruption brutale d’une industrie et donc au passage d’un mode de vie traditionnel rural à une société de consommation à l’occidentale ?
- Quels bénéfices retireront les populations riveraines non touchées par les retombées directes ou indirectes du projet et quelles nuisances vont-elles peut-être subir malgré elles ?
- Une étude épidémiologique sur la population de la région avant exploitation permettrait de faire un point zéro de l’effet du chrome héxavalant (Cr6) et du nickel dissous sur la santé et la chaine alimentaire.
- Les déchets provenant du site seront triés. L’étude d’impact précise qu’ils seront éliminés. Comment ces déchets seront-ils éliminés et quel sort réserve-t-on aux déchets spéciaux : huiles usagés, fluide hydraulique, solvants, batteries etc ?...
- L’importation de matériaux tels que le charbon, le calcaire…doit être soumis à un contrôle rigoureux pour éviter toute introduction accidentelle d’organismes exogènes à caractère nuisible ou envahissant : plantes, insectes…
La liste de ces points de vigilance n’est pas close, et chacun de ces points mériterait un développement plus approfondi, mais le temps imparti ne nous a pas permis d’aller plus loin.
3. Observations complémentaires
- Dragage du chenal et relargage des résidus
Les opérations de dragage du chenal entrainent fatalement la mise en suspension de particules fines et de métaux lourds et affecteront la topographie des fonds environnants, la faune benthique (coraux, éponges…), la chaine trophique du lagon qui sera affectée par la turbidité de l’eau. A-t-on modélisé l’étendue du panache de particules fines ? Le même problème se pose au sujet du largage des résidus de dragage. Quels impacts sur la faune des profondeurs ? Quels impacts sur la chaine trophique de la Mer de Corail dans la zone de largage ? Quels impacts par les métaux lourds ? Des travaux sérieux seront nécessaires pour mesurer les impacts réels de ces opérations.
- Emissions acides :
Rappel : SO2+H2O = H2SO4 : acide sulfurique – L’étude d’impact fait état du rejet d’environ 4 tonnes/jour soit 5110 tonnes par an de SO2 par la centrale thermique et l’usine pyro métallurgique, soit 8774 tonnes d’acide sulfurique. Quel sera le devenir du panache de SO2 dans l’atmosphère ? Quels seront les impacts des pluies acides ( H2SO4) sur la forêt de Vavouto, la mangrove et le cœur de Voh ? la forêt des contreforts du Mont Panié ?
- L’amiante
Le déplacement massif de substances minérales est susceptible dans certains endroits de libérer des particules fines d’amiante dont on connait les dangers pour la santé. Les analyses produites par l’étude d’impact semblent minimiser ce risque. Quelles mesures de précaution et de protection a-t-on prévu pour les employés du site, mais aussi éventuellement les populations riveraines en cas de transport de ces matériaux ?
- La participation statutaire des associations environnementales dans les structures de concertation
Nous constatons avec regret que la Commission mixte minière de Koné/Voh ne comprend aucun représentant d’association de défense de l’environnement. Il nous semble qu’elles devraient être prioritairement associées à toutes les phases du projet, en amont, en cours de fonctionnement et même après la fermeture du site.
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